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Crénothérapie / Thermalisme

Le thermalisme représente l’ensemble des activités tournant autour de l’utilisation des eaux thermales. Quand elle sert à traiter des maladies chroniques, on peut l’appeler crénothérapie, ou cure thermale, qui en est donc le versant médical.


Le thermalisme est une activité ancienne, puisqu’il était très prisé dans l’Antiquité romaine. Il a trouvé un second souffle à partir des années 1850. La médecine thermale tend à devenir une médecine moins empirique qu’elle ne l’a longtemps été.


Thermes et bains antiques

Les bains que les Romains prenaient dans des établissements appelés thermes faisaient partie intégrante de la civilisation romaine, très soucieuse d’hygiène. Cette bonne pratique se perdra malheureusement au fil des siècles. Le mot thermes (en latin thermae), toujours utilisé au pluriel, provient du grec thermos, qui veut dire chaud, et que nous avons gardé dans l’expression « une bouteille thermos ». Les bains (balnea) étaient très sophistiqués, avec des pièces différentes pour les bains froids (frigidarium), tièdes (tepidarium) et chauds (caldarium). Les Romains avaient même l’équivalent du sauna finlandais (laconicum ou étuve sèche) et du hammam oriental (sudatorium ou étuve humide). En clair, ils avaient déjà  tout inventé en matière de thermalisme.

Ville d’eau(x) et station thermale

En France, c’est à partir du milieu du XIXème siècle que l’on assiste à une « fièvre thermale » qui voit fleurir des villes d’eau (ou d’eaux), également appelées stations thermales, où l’on allait « prendre les eaux », selon la belle expression consacrée. Cependant l’usage des thermes n’avait pas été abandonné jusqu’à cette renaissance, à preuve que le bon roi Henri IV avait créé une Surintendance générale des bains et fontaines de son royaume. En 1854 est créée la Commission des eaux minérales, chargée de tester « scientifiquement » leurs vertus thérapeutiques.
Certaines de ces stations thermales ont été créées à l’emplacement d’anciens thermes romains (Aix-les-Bains par exemple), d’autres sur l’emplacement de sources nouvellement exploitées (Vichy notamment).
Le nom de ces villes d’eaux comporte en général une extension qui indique qu’il s’agit d’une station thermale. En français : les-Bains (Amélie-les-Bains) ; les-Eaux (Forges-les-Eaux) ; les-Thermes (Ax-les-Thermes). En anglais : Bath. En allemand : Bad (Bad-Godesberg ou Carlsbad) ou Baden (Baden-Baden, dont nous avons en France l’équivalent : Bains-les-Bains). La ville d’eau belge appelée Spa, connue pour son circuit de Formule 1 (Spa-Francorchamps)  a donné son nom à un type de bains très prisé de nos jours, le spa. Spa est par ailleurs le mot anglais qui désigne une ville d’eau.
En France, les villes thermales ont, depuis le Premier Empire, la possibilité administrative d’ouvrir un casino, ce qui permet d’occuper les curistes entre leurs soins. Enghien-les-Bains est ainsi plus connue pour son casino que pour son activité thermale. Certaines stations thermales sont devenues des lieux privilégiés de villégiature, disposant de toutes sortes d’activités (on songe au magnifique golf d’Evian), surtout quand elles possèdent un important parc hôtelier, qui témoigne de leur splendeur passée. C’est une des raisons du choix de la station thermale de Vichy, dans l’Allier, pour y installer l’administration dirigée par le maréchal Pétain pendant la guerre (le tristement célèbre régime de Vichy).

Différentes sortes d’eau

Avant de nous intéresser aux vertus thérapeutiques (réelles ou supposées, là n’est pas la question pour l’instant) des eaux thermales, fondement du thermalisme, il est nécessaire de préciser la terminologie utilisée pour caractériser les différentes sortes d’eaux.
1) Eau potable : une eau est potable (autrement dit elle peut être bue) quand elle présente un certain nombre de caractéristiques physico-chimiques et bactériologiques qui la rendent propre à la consommation. Ces caractéristiques varient d’un pays à l’autre. En France, l’eau du réseau qui coule de nos robinets est potable (sauf contamination accidentelle), ce qui fait que nous arrosons nos jardins et lavons nos voitures avec de l’eau potable, gaspillage inconnu dans d’autres pays comme les États-Unis (l’eau potable y est disponible dans de grandes bombonnes).
2) Eau de source : une eau de source est une eau embouteillée qui doit correspondre à certaines caractéristiques qui varient d’un pays à l’autre. Elle provient en réalité plus souvent d’un forage que d’une source. Le développement des eaux de source en France date des dernières décennies du XXème siècle.
3) Eau minérale naturelle : il s’agit d’une appellation qui qualifie une catégorie d’eau vendue en bouteille. D’une façon générale une eau minérale naturelle (habituellement l’expression est abrégée en eau minérale) doit posséder une origine souterraine ou géologique et une composition chimique stable, et ne doit avoir subi aucun traitement chimique. En France, l'exploitation et le conditionnement d'une source d'eau minérale nécessitent des autorisations administratives spécifiques. Dans l’Union Européenne les eaux minérales naturelles sont définies par la Directive européenne 80/777 du 15 juillet 1980, transposée dans le droit national de chaque pays.
Les eaux minérales présentent souvent des teneurs en magnésium importantes et des teneurs en nitrates généralement faibles. Leur dureté en calcium est très variable. Leur intérêt provient de la présence de substances plus rares comme le fluor ou des oligo-éléments.
Selon leur richesse en sels minéraux, on distingue cinq types d’eaux minérales : eaux bicarbonatées, sulfatées, sulfurées, chlorurées et oligométalliques. La forte minéralisation de certaines eaux les rendrait non potables au sens règlementaire du terme. La France reconnaît 82 eaux minérales naturelles sur son territoire.
Bien que la plupart des eaux minérales proviennent d’une source thermale, elles sont en général consommées en dehors de toute cure thermale, et, le plus souvent, plus pour leur goût spécifique que pour leurs vertus thérapeutiques. Après tout, la majorité des buveurs d’eaux minérales ne sont pas malades.
4) Eau thermale : une eau thermale est une eau de source naturellement minéralisée dont la composition permet une utilisation thérapeutique. Elle possède un ensemble de caractéristiques déterminant ses propriétés bénéfiques pour la santé, reconnues par l'Académie Nationale de Médecine.
On voit que les définitions de l’eau thermale et de l’eau minérale naturelle sont très proches. Pour plus de clarté, on peut estimer qu’une eau thermale est une eau destinée à être bue sur place lors d’une cure thermale, contrairement à une eau minérale, destinée à la consommation de masse.

Thermalisme, établissement thermal et cure thermale

Le thermalisme désigne l’ensemble des activités liées à l’utilisation et à l’exploitation des eaux thermales. Le mot « thermalisme » a été employé pour la première fois en 1845 ; il désignait alors l’usage médical des eaux minérales et ce n’est que depuis 1933 qu’il est utilisé dans son acception actuelle d’exploitation des sources minérales dans des stations thermales. Le thermalisme actuel comporte donc des activités non strictement médicales, comme la remise en forme.
Les activités liées au thermalisme sont prodigués dans des établissements thermaux, dont certains sont célèbres pour leur architecture. L’aspect proprement médical  du thermalisme est représenté par la cure thermale, qui est un traitement médical prescrit par un médecin (généraliste ou spécialiste) qui se déroule dans une station thermale sur une période de trois semaines, au cours desquelles le patient est traité pour sa maladie par les eaux minérales naturelles des sources thermales et par leurs produits dérivés (gaz, boues…).
Certaines stations thermales ont développé aussi des cures « libres », de durée plus courte, destinées avant tout au bien-être ou à la remise en forme.

Crénothérapie

D’après l’étymologie grecque, crénothérapie signifie   « traitement à la source ».
La crénothérapie désigne l'ensemble des techniques et des savoirs mis en œuvre lors d'une cure thermale. La crénothérapie, comme la cure thermale traditionnelle, représente donc le volet médical du thermalisme.
Les soins délivrés sont de deux types : l’hydrothérapie externe, qui consiste en bains, douches, applications de boue, pulvérisations, ou encore massages, et l’hydrothérapie interne, comprenant notamment la cure de boisson, mais aussi l’aérosolthérapie, avec par exemple l’inhalation d’eau pulvérisée.
Les soins sont prescrits au curiste, dès son arrivée à la station thermale, par un médecin thermal. Les soins prodigués ont une visée curative, mais peuvent être accompagnés d’actions préventives, dans le cadre de l’éducation thérapeutique.

Médecine thermale : indications

La médecine thermale n’est pas une spécialité médicale en tant que telle, et tout médecin, notamment généraliste, peut devenir médecin thermal. Mais, s’il veut affiner ses connaissances, le médecin thermaliste (les deux adjectifs s’emploient) aura intérêt à suivre l’enseignement de la « capacité d’hydrologie et de climatologie médicales » (c’est  nom officiel de la médecine thermale). Il peut aussi devenir membre de la Société française de médecine thermale, qui est la société savante de la discipline.
Le médecin thermal, attaché à un établissement thermal, suit le patient pendant les trois semaines de la cure dont il a prescrit les modalités lors de la consultation initiale.
La médecine thermale s’exerce dans le cadre de l’un des douze grands domaines thérapeutiques définis par la Sécurité Sociale, à savoir :
1. Rhumatologie
2. Voies respiratoires
3. Maladies cardio-artérielles
4. Phlébologie
5. Neurologie
6. Affections psycho-somatiques
7. Affections urinaires et maladies métaboliques
8. Gynécologie
9. Affections digestives et maladies métaboliques
10. Troubles du développement chez l’enfant
11. Dermatologie
12. Affections de la muqueuse bucco-linguale
Comme les affections traitées par le thermalisme sont des maladies chroniques, il est fréquent que les curistes reviennent tous les ans au même endroit pour des cures itératives.
Chaque station thermale est spécialisée dans un (parfois deux) des domaines ainsi délimités. Certaines sont hyperspécialisées, comme Avène dans la prise en charge des séquelles de brûlures.
Plaçons ici une anecdote amusante : on raconte que lorsque les Anglais de l’époque victorienne allaient soigner leur système digestif paresseux ou fatigué à  Chatel Guyon, leur pudibonderie naturelle en cette matière leur conseillait de poster leur courrier loin de la station, pour que personne en Angleterre ne soupçonne qu’ils souffraient de l’intestin.
Nous avons défini plus haut les cinq types d’eaux minérales en fonction de leur composition. Voici les principales indications de ces différentes sortes d’eaux :
1) Eaux bicarbonatées : affections du foie et des intestins ;
2) Eaux sulfatées : affections des reins, de la peau (brûlures, eczémas, cicatrices) ;
3) Eaux sulfurées : affections respiratoires et des muqueuses;
4) Eaux chlorurées : processus de croissance ;
5) Eaux oligométalliques : rhumatismes et  affections neurologiques.

Balnéothérapie et thalassothérapie

La balnéothérapie désigne l’ensemble des soins effectués grâce à des bains généraux ou locaux. C’est un terme générique, qui englobe la crénothérapie (la cure thermale) et la thalassothérapie. Cette dernière utilise uniquement l’eau de mer et les produits de l'environnement marin (algues, boue marine). La thalassothérapie a une action essentiellement préventive qui repose sur les oligo-éléments, les vitamines, les sels minéraux, et l’éducation thérapeutique.
Sur le plan de la réglementation, la thalassothérapie ne bénéficie d'aucune prise en charge par l'Assurance Maladie, bien que les soins soient surveillés médicalement.

Commercialisation de produits dérivés

Les stations thermales ne se contentent pas de commercialiser l’eau de leur sous-sol. Certaines d’entre elles, notamment celles qui sont spécialisées en dermatologie, font fabriquer des produits cosmétiques de type crèmes, onguents, lotions, dont une partie appartient à la catégorie des « syndets » (contraction de synthetic detergents), produits nettoyants moussants liquides représentant une solution alternative au savon. Ces produits portent le nom de la station qui les commercialise.

Remboursement par l’Assurance maladie

Depuis 1947, les cures thermales sont prises en charge par l’Assurance maladie, selon une grille de soins adaptée à chaque domaine pathologique. Chaque établissement thermal est agréé pour le traitement d’une ou plusieurs orientations thérapeutiques (en général 2) et tous sont conventionnés par la Sécurité sociale. Seules les cures de 18 jours prescrites par un médecin sont remboursées. Les soins de cure et le forfait de surveillance médicale (frais du médecin thermal) sont pris en charge à hauteur respective de 65 % et 70 %, parfois 100 % (dans le cadre de situations particulières comme les affectations de longue durée) par la Sécurité sociale. Celle-ci rembourse, en fonction des revenus du curiste, une partie des frais de transport (voiture, train ou avion pour les personnes habitant les DOM-TOM) et partiellement l'hébergement.
Ni les cures « libres » ni la thalassothérapie ne sont remboursées par l’Assurance maladie.

Efficacité des cures thermales

Pendant longtemps la médecine thermale est restée très empirique, loin des standards de la médecine factuelle (l’EBM des Anglo-Saxons), rendant difficile l’évaluation du fameux « service médical rendu », indispensable au remboursement.  Mais les choses sont en train d’évoluer dans le bon sens, sous l’impulsion de l’AFRETH (Association française pour la recherche thermale), créée en 2004. Son rôle est de promouvoir des études scientifiques rigoureuses (c’est-à-dire qui respectent les critères de méthodologie scientifique couramment admis) sur le service médical rendu des cures thermales. Certaines de ces études ont établi l’utilité de la cure thermale dans différentes affections comme la gonarthrose  (étude Thermarthrose), le trouble anxieux généralisé (étude Stop-TAG), le surpoids et l’obésité (étude Maâthermes).

Quelques villes d’eaux connues eu Europe

Et pour terminer ce rapide tour d’horizon, un petit voyage s’impose parmi les stations thermales les plus réputées en Europe. Tout le monde connaît la beauté architecturale de la ville de Bath, en Angleterre, ou la réputation des bains publics à Budapest, en Hongrie. En Europe, c’est l’Allemagne qui possède le plus de stations dédiées au thermalisme, devant l’Italie et la France.
Une initiative intéressante a été lancée en 2006 par la République Tchèque, qui souhaitait faire classer au Patrimoine mondial de l’Unesco les trois célèbres villes d’eaux du triangle de la Bohême de l’Ouest. Deux de ces villes sont très connues sous leur nom allemand, à savoir Carlsbad et Marienbad. En 2014, sept pays européens ont déposé une candidature commune appelée « Grandes villes d’eaux d’Europe » (Great Spas of Europe en anglais) en vue d’obtenir cette inscription pour seize stations thermales réputées : 6 en Allemagne, 4 en République Tchèque, 2 en Autriche, 1 en Belgique (Spa), 1 en France (Vichy)  1 en Italie (Montecatini Terme) et 1 au Royaume-Uni (Bath).
De bien belles destinations touristiques !

Article publié le 20 août 2018

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