Ces dernières années l’accent a été mis par les tutelles sur deux notions qui sont liées dans la gestion des risques médicaux, à savoir le dommage associé aux soins et l’évènement indésirable grave.
C’est notamment la Haute Autorité de Santé (HAS) qui est à la manœuvre dans le développement de cette culture de gestion des risques et de qualité des soins, que ce soit en médecine de ville ou en médecine hospitalière. Pour ce qui est des dommages, ils sont qualifiés de « liés aux soins » ou « associés aux soins ». Quant aux évènements indésirables, notamment ceux qui sont jugés graves (« évènement indésirable grave »), on s’intéresse principalement à ceux qui sont associés aux soins.
Soin
Le soin en cause ici englobe tout ce qui peut être fait par un médecin ou un professionnel paramédical pour soigner un patient. Il peut donc s’agir de soins médicaux, infirmiers, palliatifs ou de support, de soins de suite ou encore de soins dentaires. Certains de ces soins sont réalisés en établissement de santé, les autres en médecine « de ville ».
Par ailleurs le soin ne concerne pas que la thérapeutique, mais également le diagnostic et la prévention.
Chaque soin réalisé est potentiellement porteur de risque, certains plus que d’autres.
Risques et gestion des risques
Il convient avant tout de bien différencier « danger » et « risque » : nul ne l’ignore, la mer est dangereuse, avec des degrés qui dépendent de la météo ; chacun le sait, naviguer est risqué : le risque consiste donc à affronter un danger.
La question est de savoir si, face à un soin envisagé, il faut prendre le risque. La réponse à cette question qui se pose à de multiples reprises tous les jours à tous les professionnels concernés se trouve dans l’analyse de la balance bénéfice/risque, qui suppose que l’on puisse évaluer avec précision le danger pour savoir s’il est raisonnable de prendre le risque inhérent au soin proposé.
Cette notion de gestion organisée des risques concerne avant tout les établissements de santé. Parmi ces risques, on distingue les risques médicaux, professionnels, institutionnels, environnementaux. Tous ces risques doivent faire l’objet d’une « cartographie ».
Démarche qualité et coordination de la gestion des risques
Les établissements de santé sont tenus de mettre en place et d’appliquer une démarche qualité, sur le modèle de ce qui se fait dans l’industrie depuis longtemps. De même, la gestion des risques gagne à prendre exemple sur les secteurs très performants dans ce domaine. En particulier, la gestion des risques chirurgicaux se calque de plus en plus sur ce qui se fait depuis fort longtemps dans l’aéronautique, très en avance sur ce sujet. C’est ainsi que des « check-lists » sont apparues dans les blocs opératoires ; l’intervention ne commence que quand la check-list est validée. Mais il faut bien reconnaître que beaucoup d’équipes le font en traînant les pieds !
La gestion des risques est une des composantes essentielles de la démarche qualité ; elle est pilotée par un « coordonnateur de la gestion des risques associés aux soins ». On aura remarqué que le coordonnateur possède deux « n », alors que la coordination n’en a qu’un seul.
Dommage associé aux soins
Un dommage associé aux soins n’est rien d’autre qu’un préjudice subi par un patient à l’occasion d’un soin. Il ne doit pas être confondre avec un « évènement indésirable grave », lequel peut rester, avec de la chance et une bonne gestion, sans conséquence, et donc sans dommage réel.
Les conséquences d’un dommage peuvent être nombreuses, allant de la simple incapacité partielle à l’incapacité totale, qu’elle soit temporaire ou permanente : ITT (Incapacité totale temporaire) et IPP (Incapacité partielle permanente), et jusqu’au décès du patient.
Une petite précision sur la fameuse ITT au sens pénal du terme, dont on parle tant, notamment dans les médias : cette ITT n’a strictement rien à voir avec un quelconque arrêt de travail, ce qui explique qu’un nourrisson ou qu’un centenaire puissent être en ITT.
Les conséquences d’un dommage peuvent être non seulement physiques, mais également psychologiques, sociales ou matérielles (par exemple dans le cas d’une perte d’emploi).
Quand le dommage aboutit à la constitution d’une plainte, il devient un « sinistre ». On parle alors de « sinistralité »
Evènement indésirable
Selon la Haute Autorité de Santé (HAS), la définition d’un évènement indésirable est la suivante : « … un évènement ou une
circonstance associé aux soins qui aurait pu entraîner ou qui a entraîné une atteinte pour un patient et dont on souhaite qu’il ne se produise pas de nouveau ». On comprend bien qu’il y a évènement indésirable même s’il n’y pas eu de dommage.
Un évènement indésirable est qualifié de « grave » si ses conséquences ont été graves (et non pas auraient pu être graves) : nécessité d’hospitalisation ou de prolongement d’hospitalisation, incapacité à la sortie, et, bien sûr, risque vital avec ou sans décès.
Par ailleurs, il faut souligner qu’un évènement indésirable peut survenir en dehors de toute erreur ou faute médicale. On rappelle qu’une faute est une erreur estimée fautive par un juge. La faute est une notion juridique.
Déclaration d’un évènement indésirable
Les établissements de santé doivent mettre en place une politique de déclaration des évènements indésirables, ce qui n’est pas toujours facile à mettre en œuvre, car il faut naviguer entre deux tendances : ne pas déclarer assez, par peur de passer pour un délateur ; déclarer de manière excessive des évènements sans intérêt (du genre « il manque du papier dans la photocopieuse ou dans les toilettes). Il faut donc mettre en place une charte non punitive de déclaration des évènements indésirables.
Par ailleurs, la déclaration d’un évènement indésirable n’a pas pour but de rechercher des erreurs, mais, surtout, de mettre en place des procédures pour éviter la récidive.
Un évènement indésirable se déclare en remplissant une « fiche d’évènement indésirable ». La déclaration s’appelle également un « signalement ».
Annonce d’un dommage
C’est en partie pour éviter, autant que de possible, le recours à une action en justice à la suite d’un dommage, qu’a été mis en place le dispositif d’annonce. En effet, dans nombre de cas, quand un patient ou ses ayants droit porte plainte, leur but est d’obtenir des explications qu’ils estiment ne pas avoir eues de manière satisfaisante. Et de fait ces explications devraient toujours pouvoir être obtenues auprès du corps médical et de l’institution, sans qu’il soit nécessaire de réclamer le dossier.
Un dommage associé aux soins doit donc toujours être déclaré, soit au patient, soit à sa famille en cas de décès du patient. Il existe pour cela des procédures d’annonce précises à appliquer avec tout le tact et la sincérité nécessaires, sans rien omettre ni cacher.
Un article de cette encyclopédie est consacré à ce sujet (Annonce d’un dommage/Consultation d’annonce).
Article publié le 14 septembre 2015