L’embolie et la thrombose sont deux manifestations d’une coagulation sanguine pathologique, qui peuvent toucher les artères ou les veines.
Les affections cardiovasculaires responsables d’embolie ou de thrombose sont des maladies très fréquentes, et sont une cause majeure de morbidité et de mortalité.
Coagulation normale et coagulation pathologique
La coagulation sanguine est un processus biologique complexe, qui correspond à la phase dite d’hémostase secondaire, le terme hémostase correspondant à l’arrêt d’un saignement. Un article de cette encyclopédie est consacré à la coagulation et à l’hémostase.
La coagulation du sang est un phénomène physiologique. Quand elle est anormale (pathologique), on parle de troubles de l’hémostase, qui peuvent être de deux types : soit l’hypocoagulabilité, source de saignement, comme dans l’hémophilie, soit l’hypercoagulabilité, facteur de thrombose et d’embolie.
Caillot, thrombus ou thrombose ?
Le caillot, également appelé thrombus, est le produit final de la coagulation sanguine. Il est composé essentiellement d’une protéine, la fibrine. C’est lui qui permet l’arrêt d’un saignement en situation physiologique.
En situation pathologique, le caillot, alors appelé thrombose, est responsable d’une obstruction plus ou moins complète d’un vaisseau, artère ou veine, avec des conséquences proximales si c’est une veine, distales dans le cas d’une artère.
Pour faire simple, un thrombus est physiologique, une thrombose est pathologique. Mais il faut bien reconnaître que l’on emploie souvent ces deux termes indifféremment, et que l’on parle souvent de thrombus quand il faudrait dire thrombose.
Le pluriel de thrombus est thrombus si l’on considère qu’il s’agit d’un mot français, thrombi si on le prend pour un mot latin.
Une situation dans laquelle un vaisseau risque de se thromboser (autrement dit de se boucher) est dite thrombogène. Il convient alors de lui appliquer des mesures prophylactiques.
L’ablation chirurgicale d’une thrombose est une thrombectomie.
La dissolution médicamenteuse d’une thrombose est une thrombolyse, à laquelle, comme son nom ne l’indique pas, on peut avoir recours en cas d’embolie pulmonaire.
Thrombose veineuse ou phlébite
La thrombose veineuse est également appelée phlébite. Elle peut se développer dans le réseau veineux superficiel, notamment au niveau des membres inférieurs, et l’on parle alors de thrombose veineuse superficielle (TVS), ou de paraphlébite.
Rappelons que le réseau veineux superficiel est le siège des varices, qui sont des veines dilatées par le reflux sanguin. On doit parler de veines variqueuses, mais pas de « veines varices » comme on l’entend souvent dire.
La thrombose concerne à vrai dire plus souvent le réseau veineux profond, et, en premier chef, les veines profondes des membres inférieurs : c’est la thrombose veineuse profonde ou TVP, dont la principale cause est la stase veineuse, que l’on observe fréquemment après une intervention chirurgicale.
Le risque d’une TVS est de se transformer en TVP, quand la phlébite superficielle s’approche de l’ostium de la veine, là où elle rejoint le réseau profond, comme une rivière qui se jette dans un fleuve.
Le risque d’une TVP est beaucoup plus important que celui d’une TVS : risque aigu et vital, l’embolie pulmonaire ; risque chronique et fonctionnel, le syndrome post-thrombotique, dans lequel les veines profondes obstruées par la TVP n’ont pas retrouvé leur fonctionnement normal, avec un flux veineux devenu centrifuge (reflux). Le reflux sanguin massif entraîne un œdème chronique du membre concerné, avec des troubles trophiques cutanés à type d’ulcère veineux.
Une TVP peut aussi toucher la veine cave inférieure, le système cave supérieur (syndrome cave supérieur), ou la veine porte, qui traverse le foie. La thrombose de la veine porte (thrombose portale) est également appelée pyléphlébite.
Thrombose artérielle et ischémie
Le principe d’une thrombose artérielle est le même que celui de la thrombose veineuse, à savoir la formation d’un caillot obstruant plus ou moins la lumière artérielle, mais les conséquences en aval sont très différentes.
L’obstruction plus ou moins complète de la lumière vasculaire va entraîner une diminution de la vascularisation de l’organe concerné, phénomène appelé ischémie. Les conséquences en seront plus graves pour un organe vascularisé par une seule artère.
En l’absence de traitement, le territoire ischémié va évoluer vers la nécrose, puis éventuellement la gangrène.
L’ischémie peut être aiguë ou chronique. Au niveau des artères coronaires par exemple, une ischémie chronique est responsable d’une angine de poitrine, une ischémie aiguë d’un infarctus du myocarde.
La principale cause de thrombose artérielle est l’athérosclérose, favorisée par des facteurs comme le tabagisme, l’hypercholestérolémie ou encore le diabète.
Embolie
Une embolie est provoquée par l’irruption, dans la circulation sanguine, d’un matériel appelé embole, qui provient d’une thrombose veineuse dans le cas de l’embolie pulmonaire, mais qui peut être aussi un fragment de plaque d’athérome qui s’est détaché de la paroi d’une artère dans l’embolie artérielle, ou de la moelle osseuse dans l’embolie graisseuse venant compliquer une fracture du fémur, ou encore du liquide amniotique dans l’embolie amniotique du postpartum.
On qualifie une embolie par le territoire dans lequel l’embole vient se bloquer : embolie pulmonaire quand l’embole veineux vient obstruer tout ou partie d’une artère pulmonaire ; embolie cérébrale quand l’embole, en provenance d’une artère du cerveau, vient créer un accident vasculaire cérébral (AVC) ischémique ; embolie d’un membre responsable d’une ischémie périphérique aiguë.
Il existe une situation rare, appelée embolie paradoxale, dans laquelle une thrombose veineuse ne va pas créer d’embolie pulmonaire, mais une embolie artérielle, le plus souvent cérébrale. Ceci s’explique par une anomalie anatomique, la persistance de la perméabilité du foramen ovale, cloison qui sépare les deux oreillettes (les deux atria dans la nouvelle nomenclature). Le foramen ovale perméable s’observe chez environ 30% des individus.
Tout ce qui concerne une embolie est qualifié d’embolique. Tout ce qui peut provoquer une embolie est dit emboligène, notamment certaines cardiopathies comme l’arythmie complète par fibrillation auriculaire (ACFA), désormais appelée fibrillation atriale.
Toute situation emboligène doit déclencher la mise en œuvre de mesures prophylactiques, temporaires ou permanentes, selon la nature du risque.
L’ablation chirurgicale d’un embole est une embolectomie.
Embolie pulmonaire
Si l’on se souvient de l’anatomie du système cardiovasculaire, il existe un cœur droit et un cœur gauche. Le sang veineux est collecté par les veines caves supérieure et inférieure, qui se jettent dans l’oreillette droite ; il est ensuite propulsé dans le ventricule droit d’où il passe, pour y être oxygéné, dans le système pulmonaire via les artères pulmonaires.
Une embolie pulmonaire provient d’une thrombose veineuse, qui va venir se bloquer dans une des deux artères pulmonaires. C’est donc une pathologie veineuse, même si l’embole se trouve dans une artère, et elle concerne le cœur droit (sauf en cas d’embolie paradoxale, comme expliqué supra).
Malgré les progrès médicaux réalisés, l’embolie pulmonaire reste fréquente, et encore parfois mortelle.
Autrefois, il était d’usage de demander aux jeunes accouchées de rester alitées pendant de longs jours, ce qui provoquait de nombreuses embolies pulmonaires, lesquelles représentaient la cause principale de la mortalité obstétricale.
Depuis que l’on prescrit le lever précoce après l’accouchement, l’incidence de l’embolie pulmonaire obstétricale a considérablement baissé.
La prophylaxie de l’embolie pulmonaire passe par la prophylaxie de la thrombose veineuse, dont elle est une conséquence directe, même si la phlébite est passée inaperçue, ce qui arrive fréquemment.
Embolie artérielle
Une embolie artérielle peut découler de deux types de mécanismes : soit le détachement d’un fragment de thrombus artériel, qui va se bloquer en aval, soit la formation intracardiaque de l’embole.
Le premier mécanisme s’observe dans l’athérosclérose, le second dans les cardiopathies emboligènes, et notamment les troubles du rythme supraventriculaire.
Les conséquences de l’embolie dépendront du territoire concerné : AVC s’il s’agit d’une artère cérébrale, ischémie aiguë d’un membre en cas d’embole en provenance d’un anévrisme de l’aorte abdominale, etc.
Signalons une forme particulière d’embolie artérielle appelée occlusion de l’artère centrale de la rétine.
Embolisation
L’embolisation est un procédé de radiologie interventionnelle assez rarement utilisé, car il mobilise des moyens techniques et humains qui ne sont disponibles que dans des structures importantes de type CHU. Le principe est d’injecter dans une artère précise, un matériel destiné à obturer celle-ci.
On peut traiter par cette méthode des fibromes utérins hémorragiques ou encore une hémorragie du postpartum, de manière à éviter l’hystérectomie d’hémostase.
L’embolisation est également employé en chirurgie hépatique, de manière à obtenir une hypertrophie conservatrice du lobe qui restera après hépatectomie.
Maladie thrombo-embolique veineuse
D’une manière générale, la thrombose veineuse et sa conséquence, l’embolie pulmonaire, sont rangées sous la bannière de la maladie thrombo-embolique veineuse, cet adjectif étant souvent omis. On abrège souvent en MTE ou MTEV le nom de cette maladie qui est un véritable problème de santé publique.
On y inclut égalementt les troubles trophiques du syndrome (ou maladie) post-thrombotique.
Artériopathie chronique oblitérante
Lorsque les phénomènes d’obstruction artérielle surviennent au niveau des membres inférieurs, il s’agit alors d’artériopathie (chronique) oblitérante des membres inférieurs, ou d’artérite, ou encore d’artériosclérose (sclérose artérielle). Les deux causes principales en sont le tabagisme et le diabète.
Lorsque l’artériosclérose s’accompagne de plaques d’athérome, on parle alors d’athérosclérose. Phonétiquement, les deux vocables sont très proches.
Anticoagulants et antiagrégants plaquettaires
Embolie et thrombose sont fréquemment associées à une hypercoagulabilité (coagulation sanguine exagérée), que l’on peut combattre par deux types de médicaments, les antiagrégants plaquettaires et les anticoagulants. Les premiers interviennent dans l’hémostase primaire, les seconds dans l’hémostase secondaire, autrement dit la cascade de coagulation.
Ils n’ont donc pas les mêmes indications. Les antiagrégants sont utilisés en prophylaxie dans les affections artérielles, et les anticoagulants dans la maladie thrombo-embolique, en préventif ou en curatif, ainsi qu’en prophylaxie dans les cardiopathies emboligènes.
Un article de cette encyclopédie est consacré à ce sujet.
Article publié le 13 juin 2016