Si un acte technique est nécessaire, voire indispensable, il peut ou il doit faire l’objet d’une indication ; s’il n’est pas nécessaire, on peut s’en abstenir ; enfin, s’il est jugé trop dangereux, mieux vaut le contre-indiquer.
Alors que l’on « pose » une indication, on « émet » une contre-indication, et on « propose » l’abstention.
Abstention
En politique, l’abstention est considérée comme une mauvaise chose, un mal inhérent à la vie démocratique. De plus, il n’est pas possible de savoir si le citoyen qui s’abstient le fait par dépit ou par désintérêt pour la question posée.
En médecine, au contraire, l’abstention est un choix actif. Ce choix incombe au médecin, et non pas au patient ; si c’est ce dernier qui refuse l’acte technique qui lui est proposé, il ne s’agit pas d’une abstention, mais d’un simple refus de soin ; de même, quand un patient ne se soumet pas à un acte de dépistage qui lui est suggéré, il ne s’agit pas d’abstention mais de négligence, voire de déni.
L’abstention est une option que le praticien propose à son patient ; et même si cette option n’est pas retenue, elle doit être évoquée parmi les possibilités thérapeutiques.
Prenons un exemple simple : à la suite d’une échographie, le radiologue peut avoir suggéré la réalisation d’un scanner ou d’une IRM pour approfondir le diagnostic ; le médecin traitant du patient peut parfaitement estimer que ce complément d’examen n’est pas indispensable à la bonne prise en charge, et il expliquera alors à son patient pourquoi il lui propose de s’abstenir de le faire.
Contre-indication
Le sens de cette expression peut aller de « non recommandé » à « formellement interdit », selon le risque encouru par le patient. Ce risque peut être généré par un acte technique (il est, par exemple, contre-indiqué de réaliser un scanner avec injection en cas d’insuffisance rénale), ou par une prise médicamenteuse (il est contre-indiqué de prendre des anti-inflammatoires en même temps que des anticoagulants).
Là encore, c’est le médecin qui émet la contre-indication, en l’explicitant à son patient. Même si celui-ci insiste, le médecin doit maintenir sa contre-indication.
La contre-indication peut être « relative », si le risque paraît malgré tout raisonnable, ou « formelle » en cas de risque majeur. Elle peut aussi être « temporaire », si la situation actuelle est susceptible de s’améliorer, ou « définitive » dans le cas contraire.
Lorsqu’un médecin émet une contre-indication, on dit qu’il « récuse », ce verbe s’appliquant aussi bien au geste envisagé qu’au patient lui-même : un patient peut être récusé pour une intervention, une intervention peut être récusée chez un patient.
Indication
Le respect des « recommandations de bonne pratique » permet de savoir ce qu’il est « indiqué » de faire dans telle ou telle circonstance médicale, autrement dit ce qu’il est « recommandé » de faire.
La plupart du temps, ce qui est indiqué fait l’objet d’une prescription médicale : d’un médicament, d’un examen de laboratoire, d’un examen d’imagerie, entre autres. Dans d’autres cas, ce qui est indiqué fait l’objet d’un protocole, comme, par exemple, pour les soins postopératoires ; un protocole n’est jamais qu’une prescription non personnalisée, que l’équipe soignante applique de manière systématique.
En revanche, pour une intervention chirurgicale, il n’y a pas de prescription au sens habituel du terme : le chirurgien propose à son patient le choix thérapeutique qui lui semble le plus pertinent ; si ce choix est une intervention, on dira que le chirurgien a « posé une indication opératoire ». Le patient a évidemment toute latitude pour refuser ce choix. Et pourtant, on entend très souvent la phrase suivante dans la bouche des patients : « De toute façon, je n’ai pas le choix… », alors qu’en fait, ils ont tout-à-fait le choix. Ils veulent vraisemblablement exprimer l’idée qu’ils n’ont pas d’autre choix que de faire confiance au praticien à qui ils se sont confiés.
Opérabilité et inopérabilité
En matière de chirurgie, les patients confondent souvent les deux notions d’abstention et de contre-indication, en disant, par exemple : « le Pr Untel m’a dit que je n’étais pas opérable » (contre-indication), alors qu’il leur a simplement été expliqué que, dans leur cas, une intervention n’était pas nécessaire (abstention).
La notion d’inopérabilité peut être liée au patient, trop fragile pour être opéré, ou à la lésion, dont l’exérèse serait trop lourde de conséquences, comme c’est le cas pour certaines tumeurs cérébrales.
Adjectifs dérivés
L’adjectif dérivé du substantif « indication » est tout simplement « indiqué ».
Celui qui correspond à « contre-indication » est « contre-indiqué ».
Il n’y a pas d’adjectif dérivé du mot « abstention ».
Opérable et inopérable font référence à la notion d’opérabilité.
Article publié le 28 juillet 2014