La pression est une force qui s’exerce sur une surface. C’est une notion essentielle en physiologie, et aussi en pathologie, où elle se transforme habituellement en tension. La pression se retrouve dans nombre de domaines médicaux, et pas seulement au niveau artériel, le plus connu.
En langage médical courant, on utilise nettement plus souvent tension que pression. En théorie, on ne devrait utiliser que le second terme. Mais les mauvais usages ont la peau dure, et l’on n’imagine pas faire machine arrière et remplacer hypertension artérielle par hyperpression artérielle. En revanche, on parle toujours de pression veineuse centrale, et jamais de tension veineuse centrale. Ce paradoxe, qui nous fait parler d’hypotenseurs mais de vasopresseurs, fait partie des subtilités du langage médical.
Pression artérielle ou tension artérielle ?
La notion essentielle en physiologie est la pression, et non pas la tension. La pression représente la force exercée par une substance solide, liquide ou gazeuse sur une surface quelconque, par unité de cette surface. Cette définition s'applique par exemple à la pression atmosphérique. L’unité de pression dans le système international des unités est le pascal (Pa), qui équivaut à une force d’un newton par mètre carré. Un exemple simple : plus un individu plonge en profondeur dans la mer, plus la pression que la masse d’eau située au-dessus de lui exerce sur sa surface corporelle est forte.
Il règne une certaine pression dans les vaisseaux, artères ou veines, dite pression intravasculaire, et une autre en dehors des vaisseaux, la pression extravasculaire. On décrit, dans le système circulatoire, une circulation à haute pression (système résistif) et une autre à basse pression (système capacitatif). Le système haute pression (SHP) est composé par les artères et les artérioles ; le système basse pression (SBP) par les capillaires, les veines et la circulation pulmonaire.
La pression qui règne dans les artères est communément dénommée « tension artérielle ». Elle est habituellement mesurée indirectement par un tensiomètre, qui donne une mesure en centimètres (cmHg) ou en millimètres (mmHg) de mercure (Hg). Mais la pression peut, quand c’est nécessaire, notamment en réanimation cardiaque, faire l’objet d’une mesure directe, obtenue en introduisant une sonde dans une artère (l’artère radiale par exemple) : c’est la technique dite de la « pression artérielle sanglante » (PAS), beaucoup plus précise que la précédente. Il existe des systèmes d'auto-mesure automatisée (tensiomètre électronique) permettant au patient hypertendu d'effectuer lui-même la mesure des chiffres tensionnels à son domicile.
On voit clairement à travers les deux modes de mesure, directe ou indirecte, de la pression artérielle, que l’on utilise en pratique plus volontiers le terme « tension » (le tensiomètre) que celui de « pression » (la pression artérielle sanglante). Pression artérielle fait partie du vocabulaire des cardiologues, des anesthésistes et des réanimateurs, qui « mesurent » la pression artérielle, de préférence en mmHg. Cette mesure de la pression artérielle, en continu ou en discontinu, fait partie de la surveillance des constantes d'un opéré récent ou d'un patient en surveillance continue, surveillance appelée monitorage. Tension artérielle (TA) ressort plutôt du langage des patients et des généralistes, lesquels « prennent » la tension, la prise de la TA (habituellement en cmHg) faisant partie intégrante de l’examen clinique.
TA normale
La tension artérielle se mesure à l’aide de deux chiffres : celui de la maximale, qui correspond à la pression systolique et celui de la minimale, qui indique la pression diastolique. La systole correspond à la contraction cardiaque, et la diastole à son relâchement. Cela donne, par exemple, une tension à 140/90 mmHg (soit 14/9 mmHg), chiffres qui correspondent, selon l’OMS, aux limites supérieures de la normale. La prise de la tension doit se faire en position couchée ou assise, sur un sujet au repos physique et psychique.
Quand un sujet a une tension normale, il est dit normotendu. Au-dessus des valeurs normales, il s’agit d’une hypertension (patient hypertendu) ; en-deçà des valeurs normales, on parle d’hypotension (patient hypotendu). On notera que l’on ne dispose pas d’adjectifs équivalents à hypertendu ni à hypotendu si l’on utilise la notion de pression, et que, si l’on parle volontiers d’hyperpression, on n’utilise jamais le terme hypopression. Ceci explique probablement pourquoi on utilise plutôt tension que pression en pratique médicale courante.
Il existe deux classifications différentes des valeurs tensionnelles, celle de l’OMS (Organisation mondiale de la santé), et celle du Joint national committee VI Nord-américain. Pour l’OMS, une pression artérielle normale correspond à une systolique < 140 mmHg et à une diastolique < 90 mmHg. Pour l’organisme nord-américain, il existe trois niveaux avant l’hypertension : optimal (systolique < 120 et diastolique < 80), normal (systolique < 130 et diastolique < 85), et subnormal (systolique entre 130 et 139 ou diastolique entre 85 et 89). Ces chiffres ont évolué dans le temps, en baissant régulièrement.
La notion de valeurs normales de la tension ne correspond pas à une normalité au sens statistique du terme, autrement dit à une moyenne, mais à la corrélation avec le meilleur état de santé possible par rapport au facteur de risque que représente l’hypertension. On peut faire la même remarque pour le poids : il n’y a pas réellement un poids normal en fonction de la taille, mais un poids idéal pour prétendre à la meilleure santé possible.
Régulation de la tension artérielle
La pression artérielle est corrélée à la fréquence cardiaque, laquelle varie en fonction de l’activité physique. En conséquence, toute modification de la fréquence cardiaque entraîne une modification de la pression artérielle. Ces variations font l’objet d’un mécanisme de contrôle afin de rester dans des limites physiologiques. Cette régulation se fait grâce à une « boucle de régulation nerveuse », qui met en jeu des capteurs (les barorécepteurs), des effecteurs (le cœur) et un centre intégrateur situé dans le bulbe rachidien, lequel gère la communication entre les barorécepteurs situés dans le sinus carotidien et la crosse de l’aorte (les capteurs) et le cœur (l’effecteur) par le biais de nerfs sensitifs (nerfs afférents au bulbe) et moteurs (nerfs efférents). La diminution de la fréquence cardiaque est du domaine du parasympathique, son augmentation dépend du sympathique, lequel forme avec le parasympathique le système nerveux autonome.
Hypertension artérielle
L’hypertension artérielle est un problème majeur de santé publique, de par le nombre de sujets atteints et de par les complications qu’elle entraîne. Le coût annuel de sa prise en charge est très élevé. L’HTA est à la fois une maladie chronique très fréquente, répartie à égalité entre hommes et femmes, et un facteur de risque majeur. Dans le cadre de cet article, nous ne pourrons que survoler les principales notions.
Par définition, il y a hypertension lorsque les chiffres mesurés sont supérieurs aux valeurs normales à plusieurs reprises. Sils ne le sont qu’épisodiquement, on parle d’HTA labile, qui peut être due parfois à un « effet blouse blanche » (TA élevée uniquement au cabinet du médecin, mais pas en dehors). En fonction de l’élévation des chiffres tensionnels, on parle d’HTA de stade 1, de stade 2 ou d’HTA sévère, et parfois même d’HTA « maligne » (TA très élevée avec des complications). Une HTA est dite « résistante » si elle n’est pas contrôlée par la prise concomitante de trois hypotenseurs dont un diurétique thiazidique.
Dans 9 cas sur 10, l’HTA est dite « essentielle », c’est-à-dire qu’elle n’a pas de cause précise (pour d’autres situations pathologiques, on parlerait de maladie idiopathique). L’HTA essentielle est le plus souvent multifactorielle (âge, alimentation, diabète, poids, sédentarité, stress, etc.). Dans 10% des cas le bilan retrouve une cause ; on parle alors d’HTA secondaire. Certaines de ces causes sont accessibles à un traitement, permettant de guérir l’HTA. Trois exemples : la sténose de l’artère rénale ; le phéochromocytome, tumeur habituellement surrénalienne sécrétant des catécholamines ; le syndrome de Conn responsable d’un hyperaldostéronisme primaire.
Les principales complications de l’HTA sont cardiaques (hypertrophie ventriculaire gauche ou HVG), neurologiques (AVC), oculaires (modifications du fond d’œil rendant le FO indispensable dans le suivi des hypertendus), enfin rénales (néphroangiosclérose).
L’hypertension artérielle est un processus pathologique le plus souvent chronique, que l’on peut stabiliser, mais pas guérir, à l’inverse de l’hypotension, qui est habituellement un problème aigu et ponctuel.
Hypotension (artérielle)
Pour faire simple, l’hypotension artérielle, c’est l’inverse de l’hypertension, avec des valeurs de la pression systolique et diastolique inférieures aux valeurs normales. L’hypotension n’est pas une maladie, mais plutôt un symptôme, qui peut être permanent ou paroxystique, occasionnel ou à l'inverse fréquent. On parle souvent de « tension basse », ou encore de « petite tension ». On en décrit deux variétés particulières, l’hypotension orthostatique et le collapsus, forme grave, parfois mortelle, de l’hypotension, notamment en cas d’hémorragie grave.
Quelques mots sur l’hypotension orthostatique : elle est définie par une baisse de la pression systolique d’au moins 20 mmHg lorsque l’on passe de la position allongée (le décubitus) à la position debout. Elle entraîne une sensation de malaise qui peut aller jusqu’à la syncope. Elle s’explique par une ischémie cérébrale brutale mais passagère par défaut d’adaptation de la pression artérielle lors d’un changement de posture.
Hypotenseurs ou antihypertenseurs. Vasopresseurs
Les médicaments de l’hypertension artérielle sont parmi les plus prescrits de la pharmacopée. On les appelle hypotenseurs ou antihypertenseurs. Sans entrer dans les détails, ils appartiennent à sept classes thérapeutiques différentes :
- Les diurétiques : ils favorisent l’élimination rénale d’eau et de sel.
- Les bêtabloquants : ils ont un effet relaxant sur la paroi artérielle et le myocarde en s’opposant à l’adrénaline (hormone du stress).
- Les inhibiteurs calciques : ils favorisent la vasodilatation des artères en s’opposant à l’entrée d’ions Ca++ dans leurs cellules musculaires.
- Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) : cette enzyme est responsable de la sécrétion d’une hormone hypertensive, l’angiotensine II.
- Les antihypertenseurs centraux : ils agissent sur la boucle de régulation nerveuse de la pression artérielle.
- Les antagonistes de l’angiotensine II ou sartans : ils agissent en aval de l’enzyme de conversion, évitant certains effets secondaires des IEC.
- Les antihypertenseurs vasodilatateurs : ils relâchent la paroi des vaisseaux en bloquant les récepteurs alpha 1.
Les médicaments de l’hypotension sont appelés vasopresseurs (ils augmentent la pression artérielle), terme plus souvent employé que celui d’antihypotenseurs. Ils sont d’un usage beaucoup moins courant que les précédents car ils sont destinés à un usage aigu, contrairement aux hypotenseurs dont la prise est permanente. Certains vasopresseurs sont des vasoconstricteurs, qui augmentent la résistance vasculaire périphérique ; d’autres (comme les glucocorticoïdes) sensibilisent les récepteurs adrénergiques aux catécholamines ; d’autres enfin stimulent le débit cardiaque, comme la dopamine et la dobutamine, très utilisées en réanimation, de même que d’autres substances sympathicomimétiques comme l’adrénaline ou la noradrénaline. Ces quatre substances appartiennent au groupe des catécholamines et sont qualifiées d’amines pressives.
On ne recourt pas, bien entendu, aux mêmes médicaments pour traiter un collapsus cardiovasculaire et une simple hypotension orthostatique.
Hypertension artérielle gravidique
L’hypertension artérielle gravidique survient à partir de la vingtième semaine d’aménorrhée (SA) chez 10% des femmes enceintes sans antécédent d’HTA. Si elle s’accompagne d’une protéinurie > 300 mg/jour, il s’agit alors d’une pré-éclampsie, ou toxémie gravidique. L’HTA gravidique est la première cause de mortalité maternelle dans les pays dits développés.
Hypertension artérielle pulmonaire
La circulation pulmonaire appartient au système basse pression (SBP).
L’hypertension artérielle pulmonaire est un syndrome commun à un groupe de maladies d'évolution progressive caractérisé par une élévation anormale de la pression sanguine au niveau des artères pulmonaires. Son symptôme principal est une dyspnée (essoufflement) d'effort.
Cette maladie peu connue du grand public a été mise en lumière par le tristement célèbre scandale du Médiator©.
Hypertension intracrânienne (HTIC)
Là encore, le terme d’hypertension est mal choisi, puisqu’il s’agit d’une augmentation de la pression qui règne à l’intérieur de la boîte crânienne, par nature inextensible. C’est en fait la pression qui règne dans le liquide cérébro-spinal, autrefois appelé liquide céphalo-rachidien (LCR) qui augmente en comprimant le cerveau et ses structures annexes. Trois mécanismes peuvent entraîner ce syndrome d’HTIC, autrement dit cette augmentation de pression, avec toutes ses conséquences délétères : l’augmentation du volume cérébral (œdème cérébral par exemple) ; l’augmentation du volume sanguin cérébral (hématome entre autres) ; l'augmentation du volume de liquide cérébro-spinal (hydrocéphalie).
Tension oculaire et glaucome
La tension oculaire désigne la pression qui existe dans le milieu aqueux de l’œil, à savoir l’humeur aqueuse présente entre la cornée et le cristallin.
Pour mesurer la tension oculaire (pression intra-oculaire, PIO), on utilise un tonomètre, dont il existe deux types : le tonomètre à air, sans contact avec la cornée, qui peut être utilisé par le collaborateur de l’ophtalmologue, ou le tonomètre contact, plus fiable, mais réservé au médecin. La mesure de la tension oculaire sert à dépister un glaucome ou à évaluer un état postopératoire.
Le glaucome est une dégénérescence du nerf optique associée en règle générale à une pression intra-oculaire (PIO) élevée. L’élévation isolée de la PIO ne suffit pas à elle seule à parler de glaucome. Le glaucome entraîne une perte progressive de vision, permanente et irréversible en l’absence de traitement, qui peut aboutir à la cécité. La perte visuelle commence en périphérie, et progresse secondairement vers le centre.
Un article de cette encyclopédie (Ophtalmologie – Ophtalmologue) traite de la tension oculaire et du glaucome.
Pression veineuse centrale
La pression veineuse centrale, ou PVC, est la pression qui règne dans la veine cave supérieure (la VCS) à l’endroit où elle rejoint l’oreillette droite. Elle est mesurée grâce à un cathéter « central », dont l’extrémité est positionnée dans la VCS. La valeur normale de la PVC est de 5 cm d'H2O chez un enfant ; chez l’adulte elle est comprise entre 5 et 15 cm d'H2O.
La mesure conjointe de la PAS (pression artérielle sanglante) et de la PVC est indispensable en réanimation, pour optimiser le remplissage vasculaire. Ces mesures font partie de ce que l’on appelle le monitorage.
Pression partielle en oxygène et en dioxyde de carbone
La pression partielle en oxygène (PaO2) est définie comme la pression qu’exerce l’oxygène (en réalité le dioxyde d’oxygène, O2) dissous dans le sang artériel. La même définition s’applique à la pression partielle en dioxyde de carbone (PaCO2). Ces deux paramètres sont étudiés par la gazométrie, appelée en pratique courante les « gaz du sang », qui mesure également le pH, la saturation en oxygène (SaO2), ainsi que la concentration en bicarbonates (HCO3-), communément appelée la réserve alcaline (RA). La mesure de la PaO2 permet d’étudier la quantité de dioxyde d’oxygène transportée aux organes par le sang artériel. La gazométrie nécessite de réaliser un prélèvement sanguin artériel (en général au niveau de l’artère radiale).
Pression osmotique
La pression osmotique permet le passage, par phénomène d’osmose, de solvants à travers une membrane semi-perméable. Cette capacité est très utile en biologie cellulaire.
Pression de filtration glomérulaire et pression hydrostatique
En physiologie rénale, la pression de filtration glomérulaire permet la formation de l’urine par le glomérule rénal. Elle peut être contrebalancée par la pression hydrostatique.
Tension superficielle
La tension superficielle est un phénomène physico-chimique lié aux interactions moléculaires à l’œuvre dans un fluide. La tension superficielle est une force qui agit à l’interface entre deux liquides, et qui explique notamment le phénomène de capillarité.
Article publié le 17 septembre 2018