Compliqué peut vouloir dire aussi bien « difficile » que « suivi d’une complication », ou encore « accompagné d’une complication ».
La complication est autant redoutée par les médecins que par les patients.
Compliqué : les deux sens possibles
Compliqué peut vouloir dire, tout simplement, difficile. Une intervention compliquée est donc une intervention qui a été difficile à réaliser. Mais, compliqué peut aussi signifier « suivi de complications », lorsqu’il s’agit d’un geste technique, ou « accompagné d’une complication », lorsqu’il s’agit d’une affection.
C’est pourquoi, lorsque l’intervention a été plus difficile que prévu, j’évite dorénavant de dire aux patients : « votre intervention a été compliquée », car je les vois blêmir et me demander : « ah bon, il y a eu des complications ?». Le mot difficile est moins ambigu.
Complication : là aussi, deux sens possibles
Complication a deux sens possibles : pour certaines maladies, la complication est la forme la plus grave de cette affection. Trois exemples courants : l’infarctus du myocarde est la forme compliquée de l’angine de poitrine (« angor ») ; la cholécystite aiguë est une des complications de la lithiase vésiculaire ; pour l’appendicite aiguë, c’est la péritonite appendiculaire qui est la forme la plus grave.
La complication peut survenir après plusieurs crises banales de la maladie, comme la colique hépatique (la « crise de foie ») pour la lithiase vésiculaire ; mais elle peut aussi survenir d’emblée, sans signes avant-coureurs, que l’on appelle des « prodromes » : la plupart des péritonites appendiculaires n’ont pas été précédées de crises douloureuses évocatrices d’une appendicite aiguë.
Deuxième sens possible : après un acte technique, une complication, c’est quelque chose qui n’aurait pas dû arriver.
En règle générale, les gestes techniques ont ce que l’on appelle « des suites simples », ce qui revient à dire que tout s’est passé comme prévu. Les complications peuvent être bénignes, sans conséquences, ou plus ou moins graves, voire mortelles. Par exemple, les « infections nosocomiales », prototype même de la complication en milieu hospitalier, sont parfois sans gravité, mais encore responsables de trop de décès tous les ans.
Complication, erreur médicale, faute, aléa thérapeutique
Il est souvent difficile de faire comprendre à un patient victime d’une complication après un geste technique, que celle-ci n’est pas nécessairement, loin s’en faut, le résultat d’une erreur, voire d'une faute. C’est un peu comme pour les accidents de la circulation : on pourra difficilement considérer comme une faute de conduite un accident provoqué par l’éclatement d’un pneu. Quand c’est « la faute à pas de chance », comme on dit vulgairement, on parle « d’aléa thérapeutique ».
En matière chirurgicale, tous les opérateurs, même les meilleurs, ont des complications ; le taux moyen de ces complications est en général connu, notamment pour les plus fréquentes d’entre elles, et il est important pour un praticien de se situer dans la moyenne, et même idéalement en dessous de la moyenne : c’est un exemple assez rare de situation où il est bon d’être en dessous de la moyenne !
Complication horlogère
Gestion des complications
Quand un praticien est confronté à une complication, il ne doit surtout pas aggraver son cas, par exemple en niant la réalité de la complication. Une complication bien gérée sur le plan médical et relationnel peut, au final, se retourner à l’avantage du praticien, si son patient estime que ce dernier a fait preuve de compétence et d’honnêteté dans la prise en charge de la complication. « Errare humanum est, perseverare diabolicum », comme disaient les Romains (expression attribuée à Sénèque) autrement dit tous les médecins ont le doit d’avoir des complications, à condition de les reconnaître, de bien les prendre en charge, et de les réparer correctement.
Article publié le 13 mars 2017