Le symptôme, c’est la clé de voûte du diagnostic et, partant, de la médecine.
Les symptômes, éventuellement regroupés en syndromes, sont le point de départ de la démarche diagnostique : recueillir les symptômes fonctionnels par l’interrogatoire, les signes par l’examen clinique, est le point de départ de toute consultation médicale. Chaque symptôme porte un nom, qu’il convient pour le médecin de connaître parfaitement.
Symptôme subjectif
Le symptôme peut être subjectif, et c’est l’ensemble des plaintes d’un patient : la céphalée est un symptôme subjectif, de même que la constipation ou le mal de dos. C’est tout ce que le patient dit au médecin, et que celui-ci doit croire en toute confiance, du moins jusqu’à preuve du contraire. Il est évident que personne ne peut savoir avec certitude si quelqu’un qui dit souffrir le martyre a réellement mal.
Je suis toujours consterné par les reportages censés étudier les pratiques médicales, où des journalistes qui se croient malins jouent au faux patient, en décrivant des symptômes fictifs, comme la fatigue, pour voir comment se comportera le malheureux médecin piégé. Et l’on se gausse de la naïveté des médecins, si faciles à berner. C’est oublier que tout médecin se doit de faire confiance à la personne qui vient le consulter, surtout s’il la voit pour la première fois. La méfiance viendra éventuellement plus tard, quand le médecin aura appris à connaître son patient.
Symptôme objectif ou signe
Le symptôme peut également être objectif, c’est-à-dire qu’il est possible de le constater : la fièvre, la tachycardie, une « boule » dans le sein sont des symptômes objectifs, quantifiables par le patient et par le médecin. Cependant, un patient peut décrire un symptôme objectif que le médecin ne retrouvera pas : la boule que certaines patientes anxieuses croient sentir dans leur sein n’est parfois pas retrouvée, même par l’IRM.
Le symptôme objectif est également appelé signe. Beaucoup de ces signes portent le nom du médecin qui l’a décrit le premier : signe de Babinski en neurologie, signe de Chvostek dans la tétanie, signe de Koplik pathognomonique de la rougeole, etc…
La partie de la Médecine qui étudie les symptômes s’appelle la sémiologie (ou séméiologie).
Consultation du médecin
La consultation du médecin consiste donc à recueillir des symptômes : l’interrogatoire pour les symptômes subjectifs, l’examen clinique pour les signes objectifs. Certains symptômes sont les deux à la fois : si un patient vomit, c’est par l’interrogatoire que le médecin l’apprendra ; mais si, par malheur, le patient vomit pendant la consultation, le médecin pourra en témoigner, et déplorer les dégâts éventuels sur sa moquette.
L’interrogatoire peut parfois retrouver des symptômes annonciateurs de l’état actuel, que l’on appelle des prodromes. Des douleurs dans le bras gauche peuvent ainsi annoncer un infarctus du myocarde.
Traiter le symptôme et sa cause
Lorsqu’il s’agit de traitement, il est évidemment plus performant de traiter la cause du symptôme que le symptôme lui-même. On parle alors de traitement étiologique. Mais ce traitement étiologique n’est pas toujours possible, soit que la cause n’ait pas encore été trouvée, soit que celle-ci ne soit pas curable par les moyens actuels de la médecine.
On se contente alors de traiter le ou les symptômes, en donnant ce que l’on appelle un traitement symptomatique : des antalgiques contre la douleur, un laxatif contre la constipation, un antiémétique contre les vomissements…
Ce traitement symptomatique peut parfaitement être associé au traitement étiologique, et il n’est pas interdit, par exemple, de donner un antalgique, y compris de la morphine, à un cancéreux en chimiothérapie, loin de là.
On notera au passage qu’il y a un accent circonflexe sur le « o » de symptôme, mais pas sur celui de symptomatique ; il n’y en a pas non plus sur le « o » du mot suivant.
Syndrome
Quand des symptômes sont multiples, ils peuvent former une association caractéristique que l’on appelle un syndrome. Les nausées et les vomissements sont des symptômes ; mais s’ils sont associés au décours d’une anesthésie générale, cela devient le syndrome des nausées et vomissements post opératoires. Le ronflement est un symptôme ; mais s’il s’accompagne de somnolence dans la journée, on a probablement affaire au syndrome de l’apnée du sommeil. On le voit, il faut toujours rechercher si les symptômes du patient n’entrent pas dans le cadre d’un syndrome, ce qui permet d’affiner la démarche diagnostique.
On utilise parfois le mot syndrome comme un quasi synonyme de maladie. Ainsi le physique si particulier du Président Abraham Lincoln était dû au fait qu’il souffrait du syndrome de Marfan ou de la maladie de Marfan, au choix. La distinction entre les deux mots est parfois subtile, et l’on parlera de maladie de Untel quand on ne connaît pas la cause du syndrome, et de syndrome de Untel quand il est un élément d’une maladie plus générale, qui en est donc la cause, comme le syndrome de Goujerot-Sjögren, qui peut se rencontrer dans différentes maladies. Vous m’avez suivi ?
Attention: symptôme s’écrit avec un accent circonflexe sur le « o », , contrairement à syndrome.
Quelques noms de symptômes
Beaucoup de symptômes portent des noms très connus, comme douleur, fièvre, constipation, tachycardie… Mais d’autres portent des noms savants. En voici un petit florilège, classés par appareil.
Appareil digestif :
- la dyschésie, ou constipation terminal», est une difficulté à extérioriser les selles ;
- l’encoprésie désigne une incontinence fécale fonctionnelle, qui se voit chez l’enfant ;
- l’épreinte est une colique violente qui peut précéder l’extériorisation des selles ;
- l’ictère est le nom savant de la jaunisse ;
- la pituite désigne la régurgitation matinale fréquente chez l’alcoolique ;
- le pyrosis est une brûlure rétro-sternale ascendante due au reflux gastro-oesophagien ;
- le ténesme est une sensation de brûlure avec envie continuelle d’aller à la selle…
Appareil génital de la femme :
- les troubles des règles sont très nombreux, et portent tous un nom différent : aménorrhée : absence de règles ; dysménorrhée : règles douloureuses ; ménorragie : augmentation de l’écoulement menstruel, soit en quantité (hyperménorrhée), soit en durée (polyménorrhée) ; métrorragie : perte sanguine en dehors des règles ; méno-métrorragie : pertes sanguines quasi quotidiennes, rendant l’identification des règles impossible ; spanioménorrhée : espacement des règles.
- la leucorrhée » désigne les pertes blanches.
- les troubles liés à la ménopause, comme les bouffées vaso-motrices (les célèbres bouffées de chaleur) sont appelés troubles climatériques…
Appareil urinaire :
- la dysurie est une difficulté à démarrer la miction ; chez l’homme, ce symptôme est lié à l’hypertrophie prostatique ;
- l’énurésie est le mot savant pour désigner, chez l’enfant, le fait de « faire pipi au lit »…
- la polyurie , c’est quand le volume des urines est plus important que la moyenne, alors que dans la pollakiurie, c’est la fréquence des mictions qui est augmentée ;
- l’hématurie désigne la présence de sang dans les urines, qui deviennent rouges, alors que l’urétrorragie désigne l’extériorisation de sang par l’urètre (essentiellement celui de l’homme), en dehors de la miction ; ces deux mots ont rapport avec la présence de sang, mais sont construits de manière différente : dans hématurie, c’est le préfixe héma qui fait référence au sang, alors que dans urétrorragie, c’est le suffixe rragie qui désigne un écoulement sanguin.
Peau :
- le prurit est le nom savant qui désigne l’envie de se gratter, autrement dit la démangeaison.
Cela me démange un peu de rajouter quelques mots savants, mais je pense que cette liste est assez longue...
Article publié le 6 novembre 2017