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Diagnostic d'une douleur abdominale aiguë 2ème partie

La douleur abdominale aiguë est un motif très fréquent de consultation en urgence, qui concerne aussi bien les médecins généralistes et urgentistes, que les chirurgiens, ou encore les pédiatres quand il s’agit d’un enfant.


Ce problème diagnostique quotidien dans la pratique d’un chirurgien est abordé ici sous l’angle chirurgical, car la question qui se pose toujours en pareil cas est la suivante : la douleur du patient est-elle due ou non à une affection nécessitant  une intervention chirurgicale plus ou moins urgente ? Toute erreur de diagnostic, tout retard dans la prise de décision seraient lourds de conséquences.
Dans cette seconde partie sont exposés les résultats de l’enquête diagnostique, dont les principes ont fait l’objet de la première partie de cet article.


Orientation diagnostique

On le rappelle, les affections que nous allons énumérer sont évoquées en fonction de la conjonction de plusieurs éléments cliniques : en premier lieu, les caractéristiques de la douleur : par exemple, une colique néphrétique a une présentation clinique qui ne trompe pas ; ensuite, les symptômes associés, comme la fièvre ou les vomissements ; enfin le contexte, et, en particulier, l’âge du patient (on n’évoque pas les mêmes diagnostics chez un enfant et chez une personne âgée) ; mais le principal critère d’orientation reste la localisation de la douleur. Voici quelques exemples.
• Une douleur de l’hypochondre droit est évocatrice d’une pathologie biliaire.
• Une douleur de la fosse iliaque droite oriente vers une appendicite aiguë, ne serait-ce qu’en raison de sa fréquence.
• Une douleur de l’hypochondre gauche doit faire penser à une maladie de la rate, comme l’infarctus splénique, ou de la queue du pancréas (pancréatite).
• En fosse iliaque gauche, c’est la sigmoïdite que l’on envisagera en premier lieu, surtout chez un patient de plus de 60 ans.
• Dans la région épigastrique (celle que les patients appellent « l’estomac »), on évoquera un ulcère, une gastrite, une pancréatite, sans oublier l’infarctus du myocarde à forme abdominale.
• Au niveau péri-ombilical, on pensera à une maladie du grêle, notamment une occlusion.
• Quant à l’hypogastre (le pelvis), il est le siège préférentiel des affections gynécologiques.
• Sans oublier la hernie étranglée si la douleur siège électivement au niveau d’une hernie irréductible.
Mais avant d’énumérer les causes possibles d’une douleur abdominale aiguë, il convient de décrire quatre grands syndromes auxquels appartiennent les différentes maladies qui vont être passées en revue. 

Quatre grands syndromes

On peut regrouper la plupart des affections responsables d’une douleur abdominale aiguë en quatre grands syndromes : occlusif ; péritonéal ; hémorragique ; ischémique.
Une fois éliminées l’hémorragie interne (hémopéritoine) et l’ischémie (infarctus mésentérique), qui doivent faire l’objet d’une intervention en grande urgence, toute la démarche diagnostique va consister à classer le problème dans un des deux grands cadres que sont les syndromes occlusif et péritonéal (au sens large d’inflammation ou d’infection péritonéale). En théorie, c’est l’un ou l’autre, sauf que, lors d’une inflammation péritonéale, l’intestin peut se paralyser, donnant un « iléus réflexe », qui peut être au premier plan de la symptomatologie.

Syndrome occlusif : l’occlusion intestinale aiguë

Le syndrome occlusif associe trois symptômes fonctionnels (ou subjectifs) et deux signes physiques (ou objectifs). Les symptômes que décrit le patient sont la douleur abdominale, les vomissements « fécaloïdes » et l’arrêt des matières et des gaz. Cependant, douleur et vomissements peuvent être tardifs, en cas d’occlusion basse ; l’arrêt des matières et des gaz peut être masqué par la vidange du segment distal du côlon. L’examen de l’abdomen met en évidence un ballonnement sonore à la percussion appelé météorisme (abdomen météorisé). Mais ce signe peut manquer en cas d’occlusion haute. Le signe négatif est l’absence de défense, et, a fortiori, de contracture.
Un article de cette encyclopédie est consacré à l’occlusion intestinale. On n’en rappellera ici que les grandes lignes.
Sur le plan du mécanisme, on distingue deux types d’occlusions : fonctionnelle (ou réflexe), sans obstacle, et mécanique, avec obstacle.

• Les occlusions fonctionnelles sont également appelées iléus, comme on en observe dans la période postopératoire.
On notera que dans un intestin paralysé par une occlusion réflexe (fonctionnelle), les liquides peuvent s’évacuer, mais pas les gaz, dont la progression nécessite la présence d’un péristaltisme. En principe, la paralysie intestinale touche le grêle et le côlon. Cependant, dans la « pseudo-obstruction colique », ou syndrome d’Ogilvie, fréquent chez les personnes âgées recevant des neuroleptiques, la valvule iléo-caecale  (valvule de Bauhin) peut être continente, entraînant une distension importante du caecum sans dilatation du grêle, ce qui génère un risque de perforation « diastatique » du caecum. Inversement, la partie de l’intestin qui se paralyse au contact d’un foyer infectieux intrapéritonéal est plus souvent le grêle que le côlon.

• Les occlusions mécaniques relèvent de trois mécanismes différents : l’obstruction, le plus fréquent, la strangulation, le plus grave en termes de risque de nécrose intestinale, et l’invagination, le plus rare. Le premier mécanisme concerne habituellement le côlon, les deux autres plus souvent le grêle que le côlon.
L’obstruction est représentée essentiellement par la présence d’une tumeur colique sténosante, beaucoup plus souvent maligne que bénigne. C’est la cause la plus fréquente d’occlusion colique.
La strangulation entraîne une interruption de la circulation artérielle dans le méso de l’organe (mésentère pour le grêle, mésocôlon pour le côlon). Les symptômes sont en général très marqués et brutaux (douleur en coup de poignard, vomissements très abondants…). Les conséquences délétères pour la vitalité de l’intestin concerné sont plus rapides pour le grêle que pour le côlon. Au niveau du grêle, les deux grandes causes d’occlusion par strangulation sont la hernie étranglée (inguinale ou crurale, cette dernière de diagnostic plus difficile) et l’occlusion sur bride (qui est une forme particulière d’adhérence intrapéritonéale). Mais toute hernie douloureuse n’est pas une hernie étranglée, loin de là : il peut s’agir d’une occlusion chez un hernieux ! La véritable hernie étranglée est une urgence chirurgicale absolue, contrairement à l’occlusion sur grêle adhérentiel, qui peut être régressive. Le chirurgien doit faire preuve de beaucoup de finesse clinique pour départager les cas à opérer rapidement et ceux qui ont une chance de régresser.
Au niveau colique, la strangulation concerne le volvulus du côlon pelvien (en fait le sigmoïde) et le volvulus du caecum, le premier plus fréquent que le second. Le volvulus est un mécanisme de torsion d’un organe sur son axe vasculaire. (La « torsion de testicule », bien mal nommée, est en fait un volvulus du testicule sur son axe vasculaire, le cordon spermatique).
Le mécanisme de l’invagination est beaucoup plus rare. Il en existe une forme idiopathique apanage du petit enfant.

Syndrome péritonéal : la péritonite, localisée ou généralisée

La péritonite est une inflammation et/ou une irritation du péritoine par un liquide agressif, qui peut être du liquide gastrique (perforation d’ulcère), de la bile (cholépéritoine), des matières fécales (péritonite par perforation diverticulaire), du pus (péritonite appendiculaire). Le péritoine tolère particulièrement mal d’être au contact direct de la bile. Des mécanismes de défense naturelle se mettent en place, comme l’accolement de certaines anses grêles ou du grand épiploon à l’organe malade. Si ces moyens sont efficaces, il s’agira d’une péritonite localisée, dont l’abcès appendiculaire est le prototype. Dans le cas contraire, on assistera à une péritonite généralisée, beaucoup plus grave.
Les symptômes sont plus intenses en cas de péritonite généralisée que localisée. Classiquement, la douleur est décrite comme « un coup de tonnerre dans un ciel serein », ce qui en dit long sur la brutalité de son déclenchement. Ce genre de formule à l’emporte-pièce très prisée des anciens a tendance à se perdre. L’examen de l’abdomen retrouve une défense localisée à une région de l’abdomen en cas de péritonite localisée (en fosse iliaque droite s’il s’agit d’une appendicite), et une contracture en cas de péritonite généralisée. Cependant, chez certains sujets âgés et en mauvais état général, ces signes d’examen peuvent manquer ; on parle alors de « péritonite asthénique ».
Comme pour l’occlusion, deux mécanismes sont à l’œuvre dans la péritonite : la perforation et la diffusion.

• La perforation d’un organe creux comme l’estomac ou plus souvent le duodénum (perforation d’ulcère duodénal), ou encore le côlon (perforation d’un diverticule sigmoïdien) donne une péritonite généralisée typique avec un pneumopéritoine, c’est-à-dire de l’air contenu dans le tube digestif qui se répand dans la cavité péritonéale. En revanche, dans la perforation appendiculaire, il n’y a pas de pneumopéritoine, bien que l’appendice, partie intégrante du tube digestif, fasse partie des « organes creux ».

• La diffusion concerne les infections localisées qui diffusent plus ou moins à toute la cavité péritonéale : appendicite, cholécystite, pelvipéritonite d’origine gynécologique. Ces affections sont donc initialement des péritonites localisées qui peuvent se généraliser à l’ensemble de l’abdomen.

• Si l’on prend l’exemple de l’appendicite aiguë, on peut considérer qu’une forme simple de l’affection entraîne une irritation du péritoine de voisinage, ce dont témoigne la défense de la FID ; bien qu’il s’agisse stricto sensu d’un processus péritonéal, on ne parle pas à ce stade de péritonite appendiculaire localisée, terme que l’on réserve par exemple à l’abcès appendiculaire, avec présence de pus au contact de l’appendice. Mais l’appendicite peut aussi être responsable d’une péritonite généralisée, soit d’emblée, inaugurale,  par mécanisme de perforation de l’appendice, soit progressivement, par diffusion de l’infection à tout l’abdomen. De nos jours, c’est le premier mécanisme qui est le plus souvent à l’œuvre, car le second suppose une négligence diagnostique qui ne se rencontre plus guère. Les mêmes remarques sont valables pour la sigmoïdite diverticulaire.

Syndrome hémorragique : l’hémopéritoine non traumatique

Ce syndrome doit être reconnu sans tarder, car le pronostic vital est engagé par le processus hémorragique. La douleur s’associe à un état d’anémie aiguë qui oriente le diagnostic, et nécessite une prise en charge très urgente. Les principales causes d’un hémopéritoine non traumatique sont la rupture d’un anévrisme de l’aorte abdominale et la grossesse extra-utérine (GEU) rompue. La GEU est une grossesse dans laquelle l’embryon se développe en dehors de l’utérus, en pratique le plus souvent dans une trompe. Celle-ci finira par éclater du fait du développement de la GEU : c’est la GEU rompue, responsable d’une hémopéritoine. Bien entendu, c’est au stade de GEU non rompue qu’il est souhaitable de poser le diagnostic, à condition que la patiente consulte. Le dosage de la β-HCG et l’échographie sont les éléments clés du diagnostic. Il convient alors d’opérer rapidement, sous peine d’assister à la rupture de la GEU, qui est une urgence chirurgicale absolue. Fort heureusement, la plupart des GEU sont diagnostiquées, et donc traitées, avant le stade de rupture.
Toute douleur pelvienne chez une femme en période d’activité génitale (c’est-à-dire de la puberté à la ménopause) doit faire évoquer systématiquement ce diagnostic, qu’il vaut mieux poser par excès que par défaut. Donc, y penser toujours.

Syndrome ischémique

Une douleur abdominale, notamment épigastrique, peut être due à un infarctus du myocarde. Il faut savoir l’évoquer systématiquement, et réaliser un bilan cardiologique adéquat.
Mais c’est surtout de l’ischémie intestinale dont il est question ici. Tout patient « polyvasculaire » consultant pour une douleur abdominale aiguë doit être considéré a priori comme suspect d’être atteint par un infarctus mésentérique, affection particulièrement grave, voire mortelle en fonction de la quantité d’intestin nécrosé lors de l’intervention. En effet, une résection de tout l’intestin nécrosé n’est pas compatible avec la survie du patient. Au moindre doute, l’intervention exploratrice en urgence est indispensable.

Appendicite aiguë, ou syndrome appendiculaire

Ces quatre grands cadres nosologiques étant posés, passons au catalogue succinct des affections le plus souvent à l’origine d’une douleur abdominale aiguë. On commencera par la plus fréquente, l’appendicite aiguë.
Il s’agit d’un des diagnostics le plus souvent retrouvé à l’issue du bilan d’une douleur abdominale aiguë, spécialement si elle siège en fosse iliaque droite (la FID). Cette affection fait l’objet d’un article de cette encyclopédie, auquel je renvoie le lecteur.

Les affections biliaires et pancréatiques

Une douleur de l’hypochondre droit a de grandes chances d’être d’origine biliaire. Ces affections, notamment les deux premières, sont particulièrement fréquentes. Un article de cette encyclopédie est consacré à la bile.
La pancréatite sera traitée dans ce chapitre, en raison des connections entre le pancréas et les voies biliaires.

• Colique hépatique

Comme son nom l’indique, il s’agit d’une douleur très violente, à début brutal, bref une colique. Bien que l’on parle de colique « hépatique » (ou de « crise de foie », dans le langage commun), le foie est totalement innocent. C’est la vésicule qui est douloureuse, du fait de sa distension, en rapport avec une obstruction temporaire du canal cystique par un calcul vésiculaire. C’est exactement le même mécanisme que pour la colique néphrétique au niveau des voies urinaires. D’une manière assez générale, toute distension brutale d’un organe ou d’une structure est responsable d’une douleur aiguë.
Les caractéristiques de cette douleur de l’hypochondre droit sont en général très évocatrices. Au stade de colique hépatique, la bile est stérile et la paroi vésiculaire respectée, contrairement à ce qui se passe dans la cholécystite aiguë. La présence d’une ou de plusieurs crises de colique hépatique doit faire poser l’indication d’une cholécystectomie à froid, car la lithiase vésiculaire responsable des crises est devenue symptomatique.

• Cholécystite aiguë

La cholécystite aiguë est une inflammation du cholécyste, autrement dit de la vésicule biliaire, et plus particulièrement de sa paroi, avec ou sans infection de la bile vésiculaire. Cette inflammation se traduit par un épaississement de la paroi de l’organe, qui en permet le diagnostic échographique.
Comme pour l’appendicite aiguë, on décrit différents degrés d’atteinte vésiculaire, les plus sévères étant la cholécystite gangréneuse, responsable d’une péritonite localisée, voire la perforation d’une nécrose vésiculaire, qui génère une péritonite biliaire.
Cliniquement, la douleur s’accompagne en général d’un état fébrile. L’examen retrouve une défense localisée et une manœuvre de Murphy positive (la palpation profonde de l’hypochondre déclenche non seulement une défense,  mais aussi une inhibition respiratoire). Biologiquement, on note un syndrome inflammatoire et la normalité habituelle du bilan hépatique.
L’étiologie de loin la plus fréquente est la lithiase vésiculaire (cholécystite lithiasique) ; de même la cholécystite est la complication la plus fréquente de la lithiase biliaire. Mais il existe de rares cholécystites alithiasiques (sans lithiase), en général d’origine ischémique.

• Hydrocholécyste (et non pas hydrocholécystite)

Lorsqu’un calcul est bloqué de manière permanente dans le canal cystique ou dans l’infundibulum vésiculaire (la partie qui jouxte le canal cystique), la vésicule ne peut plus recevoir de bile en provenance des voies biliaires, et se remplit de la sécrétion de sa muqueuse qu’elle ne peut plus évacuer. Ce liquide clair, parfois appelé à tort « bile blanche », explique le terme d’hydrocholécyste (de l’eau dans la vésicule). Cette vésicule en tension permanente est bien entendu douloureuse.

• Angiocholite

La stase biliaire provoquée par un obstacle à l’écoulement de la bile dans la voie biliaire principale conduit à l’infection de celle-ci. Cette infection biliaire est responsable d’un tableau clinique appelé angiocholite, associant classiquement, et dans l’ordre d’apparition des symptômes, la douleur de l’hypochondre droit, la fièvre puis l’ictère, constituant la triade de Villard. Pour faire simple, on parle plus volontiers d’ictère douloureux et fébrile. Cependant l’ictère peut faire défaut, remplacé par une cholestase anictérique (la cholestase est une notion biologique). L’imagerie montre en général une dilatation de la voie biliaire en amont de l’obstacle, qui est le plus souvent lithiasique (lithiase de la VBP), mais qui peut être aussi de nature tumorale ou parasitaire. Cette dilatation est parfois qualifiée à tort par les radiologues d’aspect d’angiocholite.

• Iléus biliaire

L’iléus biliaire est une rareté, de diagnostic difficile. Il s’agit d’une occlusion du grêle (un iléus) de type obstructif, due à la migration tout le long de l’intestin d’un gros calcul vésiculaire qui s’est échappé de la vésicule à la faveur d’une fistule cholécysto-duodénale. Cette fistule est une communication pathologique entre la vésicule enflammée par une cholécystite et le duodénum ; elle est responsable d’un signe d’imagerie caractéristique, l’aérobilie spontanée (à l’état normal, il n’y a pas d’air dans les voies biliaires). L’aérobilie est normale après sphinctérotomie endoscopique, qui permet à l’air contenu dans le duodénum de refluer dans les voies biliaires.

• Pancréatite aiguë

La pancréatite aiguë est une inflammation de la glande pancréatique, qui se présente habituellement sous une forme modérée, mais qui peut parfois être gravissime soit d’emblée, soit secondairement.
Le pancréas est un organe postérieur, rétropéritonéal, situé devant le rachis, et dont l’extrémité distale se trouve dans l’hypochondre gauche. La douleur de la pancréatite aiguë débute donc dans l’épigastre ou dans l’hypochondre gauche, avec des irradiations postérieures. Le diagnostic est posé grâce à l’élévation de la lipasémie (supérieure à 3 fois la valeur normale). Le scanner injecté précise l’étendue et l’intensité des lésions.
Les causes les plus fréquentes de pancréatite aiguë sont la lithiase biliaire et l’alcoolisme, qui peut être responsable d’un passage à la chronicité (pancréatite chronique).

Les affections coliques

• En fosse iliaque gauche, la principale cause d’une douleur aiguë est la sigmoïdite diverticulaire, affection fréquente à laquelle on pensera d’autant plus volontiers que le sujet est âgé. Il s’agit de l’inflammation de la paroi du côlon sigmoïde porteuse de diverticules (un article de cette encyclopédie est consacré au diverticule). Le tableau clinique est celui d’une « appendicite à gauche ». Le diagnostic est établi par le scanner.
Il faut signaler que certains patients sont dotés d’un sigmoïde formant une boucle dont le sommet est situé en fosse iliaque droite ; ils vont présenter un tableau d’appendicite aiguë typique en FID en cas de sigmoïdite.
Mais un tableau de sigmoïdite peut aussi être dû à une pyélonéphrite ou à un cancer infecté du côlon gauche.
• La colite ischémique est une ischémie microcirculatoire localisée à un territoire de l’artère mésentérique inférieure, qui vascularise le côlon gauche. Elle est beaucoup moins grave que son équivalent dans le territoire mésentérique supérieur, l’infarctus mésentérique. Elle se manifeste par une douleur de la fosse iliaque gauche associée à une hémorragie digestive basse, rectorragie ou méléna, chez un patient vasculaire. C’est la rectoscopie qui permet de poser ce diagnostic.

Les pathologies uro-génitales

• L’appareil urinaire est fréquemment responsable de douleurs abdominales. Les pathologies urinaires sont les mêmes chez l’homme et chez la femme, et donnent des douleurs de la fosse lombaire irradiant vers l’aine. La plus fréquente est la colique néphrétique, tellement caractéristique que le patient la reconnaît d’emblée s’il en a déjà été victime. La pyélonéphrite, moins fréquente, y associe un syndrome inflammatoire clinique et biologique. Mais certaines coliques néphrétiques peuvent être accompagnées de fièvre, ce qui nécessite la pose en urgence d’une sonde JJ (double J) pour évacuer les urines infectées.
Il ne faudra pas, sous peine de ridicule,  se laisser piéger par une rétention aiguë d’urines, source de vives douleurs pelviennes immédiatement soulagées par le sondage vésical.
• Les affections génitales sources de douleurs abdominales ne concernent que la femme. Ces affections gynécologiques déclenchent des douleurs pelviennes, parfois latéralisées à droite ou à gauche. Schématiquement, on peut les classer en affections annexielles ou utérines ; on peut aussi les séparer en pathologies infectieuses et non infectieuses.

• Pathologies annexielles

L’annexe désigne l’ensemble constitué par l’ovaire et la trompe de Fallope. Les affections annexielles douloureuses sont la torsion d’annexe, équivalent féminin de la torsion du testicule ; le kyste hémorragique de l’ovaire ; la salpingite, infection de la trompe qui peut être uni ou bilatérale.
La salpingite est une infection ascendante de la trompe, souvent sexuellement transmise (IST), qui peut se compliquer d’un pyosalpinx (abcès de la trompe), d’une pelvipéritonite ou encore d’une thrombophlébite pelvienne.
Au bilan diagnostique habituel on adjoindra le dosage de la β-HCG, les prélèvements bactériologiques et les sérologies, notamment à la recherche d’une infection à Chlamydia.
Mais une douleur pelvienne unilatérale aiguë et fugace peut aussi n’être qu’une banale douleur d’ovulation.

• Pathologies utérines

Là encore, on distingue les affections infectieuses, comme l’endométrite (infection de l’endomètre), et non infectieuses, comme la torsion d’un fibrome sous-séreux pédiculé ou la nécrobiose aseptique de l’utérus, qui peut survenir pendant la grossesse.
Tous ces diagnostics seront facilités par l’imagerie, échographie pelvienne et scanner abdomino-pelvien.

Quelques maladies rares

Certaines affections fréquentes peuvent, de manière occasionnelle, être responsables d’une douleur abdominale. Par exemple, une douleur d’un hypochondre, droit ou gauche, peut être due à une pneumopathie. Mais il existe aussi des maladies rares qui peuvent être diagnostiquées à l’occasion d’une douleur abdominale. Certaines ont déjà été évoquées, comme l’iléus biliaire ou le volvulus du caecum. En voici trois autres.

• L’appendagite

L’appendagite est la torsion suivie de nécrose d’un appendice épiploïque colique. Ces franges graisseuses appendues tout le long de la surface du côlon peuvent se volvuler sur leur axe et donc se nécroser. Le diagnostic de cette affection à laquelle on ne pense pas souvent est fait par le scanner. Si le diagnostic est certain, l’intervention n’est pas nécessaire.

• Le diverticule de Meckel

Cette anomalie congénitale est présente chez 1 à 2% des individus quel que soit leur sexe. Il ne s’agit pas d’un diverticule au sens habituel du terme, puisque les trois tuniques sont présentes. C’est donc plutôt un second appendice, de grande taille, que l’on peut trouver sur le dernier mètre de l’intestin grêle. Il peut donner lieu à deux types de problèmes : une hémorragie digestive basse ou un syndrome douloureux abdominal aigu. L’hémorragie digestive s’explique par la présence fréquente d’une métaplasie gastrique au niveau du diverticule. Quant à la douleur, elle peut s’expliquer par une inflammation, une torsion, une perforation, ou tout autre mécanisme.

• Le syndrome de Boerhaave

Pour terminer cette revue des causes possibles d’une douleur abdominale aiguë, un mot sur le syndrome de Boerhave, qui correspond à la rupture segmentaire de la paroi de l’œsophage thoracique à la suite d’un effort de vomissement. C’est une rareté, mais particulièrement grave.

Article publié le 26 février 2018

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